Depuis près de deux ans, le Service d’Archéologie de la Ville d’Orléans (SAVO) réalise une fouille archéologique d’ampleur à l’emplacement de l’ancien hôpital Porte Madeleine, en prévision des constructions du projet urbain de la ZAC Carmes Madeleine. À cette occasion, une imposante nécropole antique en activité entre la fin du 1er et le début du 3ème siècle après Jésus-Christ a été mise au jour.
Au sein de cet espace dédié aux morts, plus de 60 sépultures ont été fouillées, dévoilant des vestiges archéologiques exceptionnels, tant par leur conservation que par leur rareté. C’est notamment le cas des tablettes de malédiction qui retiennent l’attention des archéologues et spécialistes à l’échelle européenne: des études technologiques de pointe sont en cours.
La fin du chantier de fouilles est prévue en début d’année 2025. A la phase de recueil des données sur le terrain se succèdera la phase d’étude en laboratoire afin de procéder à la rédaction des rapports de fouille et à la valorisation de toutes ces découvertes auprès du grand public et de la communauté scientifique.
La nécropole antique de l’hôpital Porte Madeleine et les autres espaces funéraires
Jusqu’alors inconnue, la nécropole antique de l’hôpital Porte Madeleine présente plusieurs caractéristiques la démarquant des autres espaces funéraires de la même période. Les sépultures sont réparties en une seule rangée, sur une bande étroite délimitée par un chemin d’un côté et un mur de l’autre.
Habituellement, les sépultures installées à l'extérieur des espaces urbains s'étalent sur de vastes surfaces. En outre, les individus ont des caractéristiques communes: les personnes enterrées sont des hommes adultes et inhumés dans des cercueils en bois (aujourd’hui disparus). L’omniprésence des inhumations est en effet un facteur inhabituel, l’immense majorité des nécropoles antiques comportant à la fois des inhumations et des incinérations.
Ainsi, si l’identité des défunts ainsi que les diverses causes de mortalité sont inconnues, les archéologues avancent l’hypothèse d’un regroupement social, selon le statut ou la profession.
Découverte de vingt et une tablettes de malédiction
Les tablettes de malédiction se démarquent tout particulièrement. Ces plaques en plomb sont dites «de défixion» du fait de l’usage répandu de transpercer la tablette par un ou plusieurs clous. Longues de quelques centimètres, généralement repliées sur elles-mêmes, elles contiennent des inscriptions en langue latine mais aussi gauloise, à destination des divinités chtoniennes (divinités infernales, par opposition avec les divinités célestes) évoquant formules magiques et malédictions.
Ces messages ne s’adressent pas aux défunts: ceux-ci font office d’intercesseurs, portant la missive jusqu’aux divinités. Ainsi, les malédictions peuvent concerner des personnes n’ayant aucun lien avec les morts.
Au total, vingt et une de ces tablettes ont été découvertes et deux ont pu être étudiées en détail. Il s’agit d’un corpus exceptionnel du fait de la rareté des inscriptions gauloises connues en France, mais également de la quantité de tablettes exhumées.
La langue gauloise est issue de la famille celtique dont découlent aujourd’hui le gaélique, le gallois et le breton, mais elle est mal connue des spécialistes. En effet, la tradition orale semble avoir prédominé sur l’écriture: les inscriptions révélant la langue gauloise ont été réalisées à partir de l’alphabet grec puis latin. En outre, l’exclusion du gaulois des usages officiels de l’empire romain n’a pas encouragé son développement à l’écrit. Dès lors, les témoignages de cette langue morte, tombée en désuétude à la fin de l’Antiquité, sont très précieux.
Suite du chantier de fouilles, rédaction de rapports et valorisation des découvertes
Pour mener l’étude de ces vestiges d’exception, le SAVO s’associe à de nombreux acteurs universitaires et scientifiques. Une première étape de restauration a été confiée à l’atelier AntePostQuem afin de préserver ces objets et de permettre des études plus poussées. Une série de clichés pris avec des angles de lumières multiples a été réalisée par Antoine Cazin, de la Fabrique de Patrimoines en Normandie, selon la méthode de la RTI (Reflectance Transformation Imaging), permettant ainsi de produire une image dynamique des tablettes déroulées.
Après un traitement logiciel, des détails invisibles à l'œil nu ou en lumière naturelle peuvent ainsi être mis en évidence. C’est ainsi que les inscriptions latines et gauloises des deux autres tablettes ont pu être détectées dans le moindre détail afin de les transmettre à Pierre-Yves Lambert, directeur de recherche au CNRS, pour leur traduction.
La fin du chantier de fouilles est prévue prochainement, en début d’année 2025. A la phase de recueil des données sur le terrain se succèdera la phase d’étude en laboratoire afin de procéder à la rédaction des rapports de fouille et à la valorisation de toutes ces découvertes auprès du grand public et de la communauté scientifique.
Le Service d'Archéologie de la Ville d'Orléans
Le Service d'Archéologie de la Ville d'Orléans assure la gestion et la mise en valeur du patrimoine archéologique et architectural sur tout le territoire communal. Il réalise des diagnostics, d...